jeudi 16 avril 2009

Panne

... d'oreiller, panne de stylo, panne d'inspiration, page blanche en panne.

Mais revenons donc à l'exercice de la description parenthèsophile.

Appelons-le Monsieur Manoir.
Monsieur Manoir dispose d'une société florissante (pour l'instant) dont la principale activité est l'aménagement économique. Ce raccourci fort peu grâcieux désigne un ensemble d'actions : achat de terrains de préférence nus, mais pas que, viabilisation (réalisation de réseaux d'assainissement, d'électricité, de voirie...) et/ou démolition de bâtiments, alotissement (découpage en lots de terrain), revente à des promoteurs qui construiront des bâtiments d'activité pour les louer, ou à des chefs d'entreprise qui y mettront leur outil de travail.
Pour assurer cette affaire qui tourne, Monsieur Manoir s'est entouré d'une assistante, qu'il salarie, d'une autre assistante, qu'il salarie aussi mais plus cher car c'est elle qui fait les études de marché, d'un associé, qui le finance, l'aide à commercialiser et à piocher dans son carnet d'adresses, d'un architecte, qu'il émolumente, d'un avocat, qu'il honorarie, d'un banquier, qui le spolie (pas encore mais tôt ou tard), d'un téléphone portable dernière génération et d'un moral à toute épreuve soutenu sans doute par quelques pilules magiques qui ont aussi la propriété de le maintenir bronzé toute l'année (à moins que ce soit ses vacances à l'Ile Maurice. Je me disais aussi).

Le problème de Monsieur Manoir, comme de tout entrepreneur, est de dégager de son opération suffisamment de bénéfices pour continuer à porter son nom sans dégât (bah oui, c'est pas un hasard, son nom.)
Et le bât blesse en plusieurs endroits.
Le vendeur du terrain nu n'est pas assez rétribué pour sa peine (oups, ça grince).
Le vendeur du terrain pas nu est plus gourmand encore que les pois de sa cravate.
L'acheteur du terrain final, qui accessoirement est celui à la cravate à pois, dispose en outre d'yeux et d'un ventre qui ne cessent de grossir tour à tour (et je le soupçonne pour finir de jouer à la Grenouille qui voulait se faire aussi grosse que le Bœuf; il faut aimer la rumination).
Vous noterez que jusque là, les projets de Monsieur Manoir, quoiqu'un brin ambitieux, se passaient sans trop de heurts, surtout avec les huiles locales dans les rouages.
Bon. Là, Monsieur Manoir veut des garanties. On ne signe pas des contrats de millions d'euros sans prendre quelques précautions administratives, ça va de soi.
Il se tourne donc vers les services publics, à savoir votre serviteuse, et dépose avec son architecte (redoutablement intelligent et d'un fort bon coup de crayon) un permis de construire.
Là où ça se corse, c'est que les routiers, appelés à la rescousse pendant la vérification d'usage, jugent que (le terrain de) Monsieur Manoir n'est pas assez bien branché et se mêlent de l'emmancher un peu mieux.
L'emmanchage est de taille, il bouscule le projet, que dis-je, il le démultiplie, Socorro crie Monsieur Manoir, A moi les services publics.

Ah, les bons services publics. Mais bon sang, mais c'est bien sûr, nous aurions dû y penser avant. L'emmanchage est sur la grand'route, c'est aux routiers de le programmer !
Donc, voilà la situation :

Monsieur Manoir va obtenir un permis de construire après avoir été facturé de quelques dizaines d'études, et l'emmanchage, qui autorise la cravate à pois à venir mettre ses doigts de pieds en bouquets de violette dans son outil de travail tout neuf, sera payé par (Tonton pourquoi tu tousses ?) vozigues, vopommes (-pom girls). Bon, c'est légèrement plus compliqué que ça mais vous avez saisi l'idée.
Donc, me direz-vous, et là, pourquoi on ne refuse pas le permis de construire ? pourquoi le service public ne récupère-t-il pas les sous de l'emmanchage ?

Ah, mais il les récupèrera. Peut-être. Va savoir. On ne sait jamais, avec le vent.

1 commentaire:

A vous les crayons...