mercredi 23 septembre 2009

Ouvrez la bouche et dites "A"


Mon bureau, c'est un petit peu mon thermomètre usuel pour prendre la température de mes contemporains-raines.


Je suis, par la nature de mon métier, fort sédentaire, tandis que la nature de la radio-mairie (version plus endogène de la Radio Langue De Pute qui sévit dans certaines familles), est plutôt balladeuse.



De telle sorte que viennent à mon bureau nombre de collègues (plus tangibles que les rumeurs, mais en réalité ce sont les mêmes vecteurs de transport), qui échangent avec mon assistante et moi des propos doux-amers sur la hiérarchie, les pestes, les coléreux, et autres joyeuses contaminations de notre biotope.

C'est ainsi que je plante innocemment mon instrument de mesure dans le fondement de l'humeur du jour.

La population sujet de mon épidémiologie s'incarne dans la simple et moyenne ménagère de moins de 50 ans, qui s'habille comme dans les magazines, se coiffe comme dans les magazines, mange comme dans les magazines, regarde la télé comme dans télé-magazine.
A la nuance près que sa médiocrité ne la navre pas autant que la condescendance crasse de son patron et que l'âcreté des humeurs de sa chef.

Encore que navrer ne soit pas le verbe adéquat.

Je dirais plutôt, aigrir.

Car, la voilà, la température de mes contemporaines-rains : l'aigritude.

La conscience est, pour sa part, une température que je relève rarement sur mon thermomètre.
De la rancœur, du mépris, de l'insolence, de l'indécence, en veux-tu en voilà. Règne de l'individualisme, de l'envie, de la bassesse, de la petitesse, de la mesquinerie, ce que les autres ont, on le veut on l'aura.
Ne passez plus, on a déjà donné, maintenant c'est nous d'abord, le déluge après. (Seigneur, que de fois l'ouis-je, cette litanie honnie ?)
Du recul, de la hauteur de vue, de la générosité ? mais on n'en a plus en rayon, ma pauvre dame, c'est qu'on ne la vendait plus, même à perte !

Que dites-vous ? l'abnégation ? Au musée, au fond à droite, dans la réserve, avec la grandeur d'âme... mon thermomètre aura loin à s'enfoncer, je vous le dis...



Forcément, moi, en digne disciple de l'HACHEB, je trépigne, je fulmine, je crache, je rugis, je vocifère, bref, je fausse mon thermomètre… et je n'ai plus qu'à faire baisser le mercure pour reprendre l'étude à zéro… demain.


A ce soir, mon chérichéri…

vendredi 28 août 2009

Couronnes roses

Pour l'instant, rien ne souffle
Pour l'instant, rien ne bouge
Et comme en chaque temprane maudite, il faut pourtant qu'il crève, ce maudit noir dessus.

J'ai peine à trouver le canal à mes peines, ce tout petit tuyau si ténu et si incertain qui se déchire en arrivant au bout,
Les bordures livides de mes chairs opales, plus dénaturées qu'un cancer, écrasent mon savoir, éclipsent ma tension de vivre, et je suis vide, et vide, et vide chaque fois
Vide de haine contre le vent implacable du temps qui file sa toile vaine
Vide et en prison, vide et en colère, vide à me taire

Vide à demander pardon

mercredi 5 août 2009

Architecte et panurgeophobe !



A l'instar de mon préféResse, le responsable des propos suivants fait une allergie sévère à la propension de ses contemporains à la plus navrante étroitesse d'esprit. Il stigmatise avec une vigueur peu commune, la malheureuse et pourtant fort répandue tendance de l'Administration à opposer une résistance farouche à toute espèce de bonnes idées en usant de l'excès de zèle et en levant bien haut une réglementation sans manquer de se draper avec dignité dans le manteau de la République.

Victime à mes heures de cette redoutable engeance qu'est le service instructeur (ou destructeur, selon l'interprétation) des autorisations d'urbanisme , je ne résiste pas au plaisir de vous livrer ces lignes repérées sur un forum de discussion en Urbanisme. J'en ai expurgé quelques fautes dues à la manifeste rage de leur auteur, que je remercie pour sa contribution, mais style et sens n'ont pas été touchés.

Pour la compréhension du lecteur, un petit point sur le contexte : le Monsieur qui s'exprime ici est architecte libéral et peste (Peste ! le mot est faible…) en répondant à un mien congénère qui se réjouissait que nous ne soyions pas à la botte des architectes et que nous fassions respecter avec constance les règles (souvent absurdes et absconses, admettons-le) de nos Plans Locaux d'Urbanisme (PLU) issus d'une pratique éminemment démocratique.

(Petit indice : NDLB, note de la blogueuse, pour expliciter le propos)


" Allons ... qui parle de bottes quand juste un petit coup de pied au cul ne ferait pas de mal à certains 'représentants' de, comme vous dites, notre Démocratie.

L'écriture des PLU n'a rien de tel [NDLB : démocrate s'entend] hors une confiance absolue en de précaires élus et surtout en leurs services d'urbanistes dont on connaît bien la légitimité.
Poser quelques remarques sur les documents que bien entendu la population est à même de comprendre avec les bo dessins colorés de ces mêmes services et leurs schémas si clairs qui vous expliquent comment insérer leurs propres volontés spatiales et esthétiques [NDLB : dans votre projet architectural].
Chaque petit PLU local s'élabore grâce à l'aide d'urbanistes 'indépendants' de formation précaire, architectes incompétents pour la plupart sortis de stage de désinformation Sciences Popo pour carnet d'adresses [NDLB : il doit plutôt s'agir de CV ou de référence], ayant investi dans la Bible du Code de l'Urbanisme, le Coran du Code de la Construction, le Talmud du Code Civil etc... de paysagistes douteux planteurs de choux exotiques, de désigneurs catalogués de bancs publics, de CAUE à la petite semaine [NDLB : Conseil Architecture Urbanisme Environnement, service gratuit], d'associations estampillées patrimoine, hérissons ou autres, la cour des miracles citoyens fait office de représentation démocratique. Voyez, voyez...


Oui, il y a larbins instructeurs quand : ils osent réclamer des exemplaires supplémentaires de formulaires de PC [permis de construire], de production de plans intérieurs [NDLB : cela ne peut pas être exigé !], que d'obtenir rendez-vous pour synthèse pré ou post dépôt est une sinécure, à votre bon coeur Messieurs, quand les délais octroyés pour des cas spécifiques (ABF [Architecte des Bâtiments de France] et autres) deviennent banalement leurs [NDLB : c'est-à-dire que même pourvus de la réponse du service consulté, ils ne répondent pas tout de suite et attendent que le délai légal s'écoule], quand l'arme fatale de telle jurisprudence détournée de sa légitimité est sortie du chapeau, quand ... de peur de s'éloigner du seul plan important : celui de leur carrière.

Allons... il serait temps que tous ces chers urbanistes se sentent un peu plus responsables du désastre urbain et social, du coût de leur inertie et de leurs inepties.

Les architectes sont, comme vous dites, bien souvent sous la botte des grands groupes du BTP [Bâtiment Travaux Publics], mais ne seraient-ce pas ces derniers qui par leurs lobbyings font promulguer à force députés tous ces textes que vous appliquez avec tant de conscience républicaine? garde à vous !
Allons de quelle architecture parlez-vous, celle des derniers écolos de façades, des tours sans fin ?
Je suis architecte, avec encore un Ordre et une déontonlogie au service de l'intérêt public.
Je pratique avec tous les risques sur mes biens propres, en attente de disparaître dès que la Loi sur les Sociétés d'Architecture sera passée [NDLB : suite à un prochain épisode].
Vous avez préparé le terrain, par vos règles loin de tout Art.
Aux trente glorieuses d'une Modernité bafouée ont suivi trente années de spéculation urbaine, de quoi se réjouir ?
La Démocratie exige des hommes debout, les larbins sont d'une autre histoire."

vendredi 10 juillet 2009

Eco-construction : le recyclage

Tous les professionnels du BTP (Bâtiment et Travaux Publics) le savent, le plus immonde dans la construction, c'est la démolition. C'est compliqué, sale, dangereux, et puis on ne sait pas comment se débarrasser des matériaux.
Un chemin de terre isolé est hélas, souvent, rempli d'immondices, gravats, matériaux sales voire parfois dangereux : les entreprises ne savent pas où les déposer, les déchetteries ne traitent pas suffisamment les gros volumes, et les matières dangereuses exigent un traitement spécial et coûteux.





Voici une expérience très intéressante, près de Boston (Massachussets, E.U.) : la Big Dig House, construite à partir de matériaux de récupération d'une autoroute. Ce projet de 316 m² laisse entrevoir un bel espoir : enfin construire du neuf avec du vieux. Ce n'est pas dommage.

Plus de photos et de précisions sur Future Architecture.

vendredi 26 juin 2009

Vapeurs

exemple a ne pas suivre
Ce petit billet pour exprimer mon indignation face à la mauvaise foi pétrifiante, l'incurie confondante et la révoltante insistance d'un architecte pour conserver un projet qu'il a bien consciencieusement massacré, il faut le dire. Un (mauvais) géomètre aurait pu en faire autant.
Et ce n'est pas la première fois qu'il sévit dans le coin.

Je ne suis pas la seule à le penser, les bras en tombent à plus d'un.

Mais un engagement moral est un engagement, pas vrai ? On peut juste se demander lequel des deux engagés respecterait le moins son engagement dans cette affaire...

vendredi 12 juin 2009

La bique et le roquet

Pendant que la course cycliste bat son plein dans ma rue, je me rappelle quelle bique j'étais en sport, en général, et en sport co en particulier.
Sauf au volley-ball.

Au volley, j'étais imparable au service. Un coup de poignet un rien lifté, et une balle à la cuillère impossible à rattraper. Et quand les adversaires, d'aventure, la rattrapaient, ils n'arrivaient jamais à dépasser le filet.
Dix points comme ça défilaient.
Et puis les co-équipiers me félicitaient, et c'était terminé.

J'ai un ego à flinguer.
A chaque fois je me méfiais de ce moment-là, mais à chaque fois je ratais le service suivant, ou celui d'après.

Bah, "mon pote", ça n'a pas changé avec l'age. Et pourtant je me méfie encore plus de moi-meme. Rien à faire, je suis singulièrement vaniteuse.
Et dès qu'on me brosse dans le sens du poil, ça ne manque pas : je rate le service.

Il va falloir que je trouve une attitude réflexe, le genre d'anerie que les psys comportementaux t'apprennent pour traverser les moments difficiles.

Oué.

Des suggestions ?

samedi 30 mai 2009

Un petit coup de calcaire ?

A regarder jusqu'à la fin...



Bon week-end à tous...

mercredi 27 mai 2009

Première pierre


Aujourd'hui, après des années de tractation, réunions, coups de téléphone… des tonnes de plans, des quintaux de paperasse, des coupes, des photos, des axonométries (ces plans en trois dimensions où apparaissent le chien du voisin et le petit dernier sur son vélo), après des millions d'euros dépensés et d'autres à dépenser, bref, après le montage opérationnel, foncier et financier, enfin, la première pierre d'un lotissement de 250 logements environ. Le Vieux Moulin sera un modèle de mixité sociale. Sur les 250 logements, il y aura des immeubles, des maisons, des terrains à construire ; des locatifs ou de l'accession à la propriété ; du social et du privé…
Dans une ville de 2500 habitants, cela représentera une augmentation de plus d'un quart du nombre de logements, entre 700 et 900 habitants, la majorité jeunes en âge de faire des enfants. L'apport de population attendu sera, soi-disant, minime, car il s'agira dans de nombreux cas d'enfants du pays ou d'habitants du village. Mais même en tablant sur quelques cas de "décohabitation" (terme barbare qui désigne autant les jeunes qui quittent leurs parents, que les parents qui se séparent), il y aura forcément du renouvellement de population, de l'apport de l'extérieur, et donc une croissance démographique forte.
Aussi, il faudra prévoir la création de places en crèches, et de classes.
Les équipements et les associations devront se redimensionner.
La Commune devra s'adapter pour faire face à cet afflux et poursuivre la même qualité de service, pour plus d'un quart de population en plus.
Ce défi pour l'organisation et pour le budget, est un moment très intéressant dans une collectivité pour le personnel et pour les cadres, et il faut que les élus se forment également à cette nouvelle configuration, que les délégations fonctionnent à plein.
Mais dans des communes où la tradition est aussi ancienne que les équipes, la souplesse est moindre et peut beaucoup gêner le processus d'évolution.

A nous, au service urbanisme comme aux services transversaux, d'attirer l'attention sur les enjeux, de produire les scénarios d'évolution, pour permettre aux élus d'anticiper, de redéfinir les besoins, les priorités, de redessiner, en somme, leur politique.

mardi 26 mai 2009

Voilà à quoi mène...



Le cartable. Ma hantise du soir.
Il ne devait rien manquer pour le lendemain. Les cahiers, les livres du jour, et tout le matériel avec les feutres, les crayons de couleur.
J'aurais pu tout laisser dedans, mais d'une part il fallait bien faire les devoirs, et d'autre part il aurait été trop lourd à porter.
Aussi, chaque soir, à l'aide du cahier de texte, il fallait faire l'inventaire. Mais chaque matin, en classe, je me lamentais d'avoir oublié quelque chose.
Si la matière avait lieu le matin, je rougissais très fort, je levais le doigt, je demandais au maître de pallier ma distraction. Il me faisait encore plus honte, en me proposant de suivre avec la camarade qui avait pensé, elle, à son livre, ou en me disant d'aller au tableau puisque j'avais oublié mon ardoise.
Le cauchemar prenait fin avec la matière suivante, mais mes joues cuisaient encore lorsque je rentrais à midi.
Si la matière avait lieu l'après-midi, je revenais de la maison où papa nous avait cuisiné des escalopes panées avec des pâtes au ketchup, avec dans la main un petit sachet plastique contenant l'objet manquant, et au ventre la frustration d'avoir manqué une partie de Danièle Gilbert et de la vedette du jour.

Sur chacun de mes carnets de correspondance, à côté de "bonne élève", il y avait marqué, "un peu distraite" ou "étourdie".

Ça a l'air très banal, et sans conséquence. Pourtant, j'étais fille d'enseignants, réussir à l'école était incontournable. Pas pour "faire plaisir" à mes parents, mais pour exister à leurs yeux. En tout cas, selon moi. Par conformisme, avoir une légitimité passait par le fait d'être première de la classe (comme quoi le ridicule ne m'a pas encore tuée). Qu'une Roselyne me passe devant, et j'étais vexée comme un pou. Pire, j'étais déconsidérée. Bonne à jeter. A mes propres yeux, car il me faut admettre que me parents, bien que fiers de mes résultats, n'en ont jamais fait un ultimatum ou une condition de quoi que ce soit.


Et malgré cet enjeu, rien n'a corrigé mon terrible défaut.
J'ai bien essayé de compenser par de l'organisation. J'ai multiplié les outils : la liste compulsive (lâchée dans la quinzaine suivante), l'agenda organiseur (vide après deux mois), les check-lists sur l'ordinateur (remplies pendant une semaine) : rien n'y fait. J'oublie toujours quelque chose.
Il n'y a qu'un truc à quoi je peux me fier : mes prises de note sur le vif, très complètes, avec la croix encerclée devant ce que j'ai à faire. Risible, puéril, mais efficace.

Et depuis ce temps d'écolière, rien n'a vraiment changé. Ma vie professionnelle se résumerait presque à une succession d'essais pour corriger cette étourderie, comme on frotte inutilement une tache qui refuse de partir.
Pis, on dirait que j'ai choisi exprès des postes qui m'exposent en permanence aux risques que me fait courir ma distraction.
Au lieu, naturellement, de trouver un métier dans lequel la rêverie serait plus qu'un atout, une qualité majeure, je persiste à occuper des fonctions dans lesquelles on passe son temps à mener des procédures, quand un oubli peut y être fatal.
Il semble que j'aie toujours envie de prouver, trente ans après, que je peux y arriver.
J'aurais peut-être pu être une bonne architecte-urbaniste.
Je ne le saurai sans doute jamais.
Voilà à quoi mène... l'obstination.

dimanche 24 mai 2009

Old Fashioned Week-end


Un autre pélérinage s'achève, le deuxième pour moi.
L'Ascension, un moment chargé de symboles pour les chrétiens, et un très long week-end souvent propice au rapprochement entre les etres.

Des amis, leurs enfants, le temps qui s'écoule autrement.

Une vraie détente, des confidences, des fous rires, des Moquitos en trop...

Et pour finir, le Boulevard du Crépuscule sur fond de soirée presque estivale, fenetre ouverte, lueurs tardives.

C'est à leur saveur contrastée qu'on reconnait les moments de bonheur.

mardi 19 mai 2009

La télé en désordre



Il y a plus navrant que les programmes de la télévision.

Il y a les soirées passées devant.

Bien souvent, scotchée à mon écran, je me dis que je vaux mieux, que je sais faire mieux, et pourtant je reste avachie.
Je n'ai plus de volonté, devant la télé je suis un veau.

Il me manque le persil dans les narines, et je doute être de prime fraîcheur sous la dent.

Bon, c'est dit, mais je n'arriverais pas à me fader des idioties comme la Nouvelle Star. La médiocrité m'exaspère, la veulerie crasse me rend chèvre (et du veau à la chèvre le saut n'est pas aisé, reconnaissez).
Je demeure inassouvie d'une forme de quête. Je sais constater mes limites, mais je refuse de régresser, et je veux continuer à regarder vers le haut.

Hier soir, Lord of War, que j'avais déjà vu en compagnie de mon cher et tendre, m'a de nouveau frappée de sa sauvagerie.
Sauvagerie de l'indécence, de l'indifférence, de la cupidité, de l'atrocité des êtres et des choses. Sauvagerie de cette dépendance féroce à la reconnaissance, celle de l'argent, celle du pouvoir. Sauvagerie du contraste entre les égos et l'absence d'amour propre. Sauvagerie de l'Histoire, crue, assassine, incommensurable cruauté des êtres, révulsion, totale, face à ceux qui la conduisent, ceux qui y contribuent, par une lâcheté coupable, par un détachement effrayant, par un fatalisme épouvantable.
Des engrenages de la vie, ceux qui broient le plus m'ont épargnée, et je vois ces horreurs dans l'écran comme dans le viseur d'un canon, et je me sens parfois plus immorale que ceux que je condamne. Un temps j'ai pensé qu'il valait mieux ne rien faire et ignorer, que cautionner un système en le dénigrant.
L'absurdité, totale, de cette attitude, aujourd'hui me frappe ; je ne connaissais pas, et je voulais mieux connaître avant de m'engager, mais c'était déjà s'engager de ne rien faire, de laisser faire.
Je mesure mon impuissance, la dérision de ma rage et son enfermement dans un monde privé de valeurs, où les valeurs surabondent à tel point qu'elles s'annulent toutes.
Je sais combien inutile est un combat sans adversaire, car tout un chacun est bien d'accord, tous ces massacres, c'est horrible.
Mais si je trouve l'angle, je m'infiltre, et je taille. Je taille.

samedi 16 mai 2009

Claire

Claire aux fontaines, Claire est partie à la poursuite des étoiles.
Toutes les fibres fines et fortes qu'elle avait tissées, mettre de la lumière dessus.
Suivre sa course dans les mélèzes.
La porter en moi, au-delà.

Elle va me manquer, tant.

jeudi 30 avril 2009

"Chérie, tu veux un piano ?"

Dans mon ancien poste, j'ai beaucoup contribué au Plan Local d'Urbanisme (PLU) dont il est question dans les vidéos suivantes, car je travaillais dans une commune d'Angers Loire Métropole.
Il y avait peu de chances pour que ce PLU échappe à un contentieux, et de fait il a été attaqué par les associations locales, entre autres, qui ont estimé qu'elles n'avaient pas été assez associées à l'élaboration.
L'une d'entre elles, la Sauvegarde de l'Anjou, avait ses locaux pas très loin de chez moi, à coté d'un vendeur de pianos... (souvenirs souvenirs... soupir).
L'annulation par le Tribunal Administratif de ce PLU, qui couvre non pas une mais quatre communes, tombe mal au moment où, avec le tram, Angers allait mettre le paquet sur son développement en matière d'habitat.
C'est la rançon d'avoir un territoire de grande qualité... ça fait beaucoup d'enjeux, et beaucoup de jaloux.

Il est question de remettre le dossier à l'enquete publique dès l'automne prochain, mais cette précipitation n'augure encore rien de bon. D'ailleurs, cet "échec", de taille, fait largement l'affaire de l'opposition au Maire actuel...




Vieilleries

J'appuie ma figure sur mon passé. Je clos les portes et les volets, ne laisse s'infiltrer qu'un pauvre rai de soleil, comme si canicule il y avait.

Je ferme, et je grelotte seule, instantanée louange à mes frayeurs indicibles.

Et pourtant je sais, la chaleur et l'envie, mais les courroies sont usées et mon frisson s'épuise.



Il s'est consumé, un jour, au bord du jardin vieux, sur cette chaise grise, alors que je flambais. Il s'est consumé comme un pieu dans le feu de mon cœur.

mercredi 29 avril 2009

Grand Paris, la suite



Aujourd'hui le PD-RF-SA (Sévissant Actuellement) a solennellement présenté le projet du Grand Paris 2030.
Encore assez peu de dépeches en rendent compte mais j'ai bien aimé les articles du Monde et de France Info sur la question.
Bonne culture...

vendredi 17 avril 2009

De la vocation d'architecte



L'inaltérable Yves Calvi, dont je suis une fidèle auditrice (mais pas téléspectatrice), a fait découvrir sur France Inter l'architecte Paul Andreu, qui a conçu et construit Roissy 1 et 2, et a beaucoup travaillé en Chine dernièrement.

Il présentait son dernier livre, un roman nommé "La Maison", que je suis en train de lire. Il me semble traiter de la genèse de la vocation d'un architecte, sa sensibilité si particulière aux constructions, aux topographies, aux volumes, aux lumières, aux interactions entre les espaces. C'est intéressant, peut-être un brin froid, désincarné, mais je n'en suis qu'au début et ce peut être de la pudeur. En tout cas, l'on saisit comment la mémoire de cet homme a fonctionné, comme il a un sens aigu de l'orientation, du repère dans l'espace, comme il est sensuel.

Par exemple, il évoquait pendant l'émission en question des bruits de chantier, qui semblent le toucher comme une preuve de vie. C'est assez rare chez un "grand" architecte et c'est notable : nombreux sont ceux qui fuient le chantier et le délèguent à un bureau d'études.
Autre particularité de Paul Andreu, sa revendication de la liberté artistique de l'architecte. Cela me défrise un peu en tant que maître d'ouvrage, mais à son niveau d'exercice, cela se justifie tout à fait.
Il considère que le maître d'ouvrage est là pour indiquer ses besoins et donner son enveloppe, mais que ces deux éléments sont les seules contraintes de l'architecte et que le maître de l'ouvrage ne doit pas, en aucun cas, donner son avis sur les orientations du maître d'oeuvre : il explique qu'il y a toujours des raisons à un plafond situé à 10 mètres de haut, à un sol luxueux avec des murs "pauvres", et qu'il n'est pas question qu'il laisse le soin au destinataire de l'ouvrage d'en décider autrement.
Au moins, c'est tyrannique, mais c'est clair.



Enfin, un homme à découvrir, des constructions aux douces courbes à faire rêver...

jeudi 16 avril 2009

Panne

... d'oreiller, panne de stylo, panne d'inspiration, page blanche en panne.

Mais revenons donc à l'exercice de la description parenthèsophile.

Appelons-le Monsieur Manoir.
Monsieur Manoir dispose d'une société florissante (pour l'instant) dont la principale activité est l'aménagement économique. Ce raccourci fort peu grâcieux désigne un ensemble d'actions : achat de terrains de préférence nus, mais pas que, viabilisation (réalisation de réseaux d'assainissement, d'électricité, de voirie...) et/ou démolition de bâtiments, alotissement (découpage en lots de terrain), revente à des promoteurs qui construiront des bâtiments d'activité pour les louer, ou à des chefs d'entreprise qui y mettront leur outil de travail.
Pour assurer cette affaire qui tourne, Monsieur Manoir s'est entouré d'une assistante, qu'il salarie, d'une autre assistante, qu'il salarie aussi mais plus cher car c'est elle qui fait les études de marché, d'un associé, qui le finance, l'aide à commercialiser et à piocher dans son carnet d'adresses, d'un architecte, qu'il émolumente, d'un avocat, qu'il honorarie, d'un banquier, qui le spolie (pas encore mais tôt ou tard), d'un téléphone portable dernière génération et d'un moral à toute épreuve soutenu sans doute par quelques pilules magiques qui ont aussi la propriété de le maintenir bronzé toute l'année (à moins que ce soit ses vacances à l'Ile Maurice. Je me disais aussi).

Le problème de Monsieur Manoir, comme de tout entrepreneur, est de dégager de son opération suffisamment de bénéfices pour continuer à porter son nom sans dégât (bah oui, c'est pas un hasard, son nom.)
Et le bât blesse en plusieurs endroits.
Le vendeur du terrain nu n'est pas assez rétribué pour sa peine (oups, ça grince).
Le vendeur du terrain pas nu est plus gourmand encore que les pois de sa cravate.
L'acheteur du terrain final, qui accessoirement est celui à la cravate à pois, dispose en outre d'yeux et d'un ventre qui ne cessent de grossir tour à tour (et je le soupçonne pour finir de jouer à la Grenouille qui voulait se faire aussi grosse que le Bœuf; il faut aimer la rumination).
Vous noterez que jusque là, les projets de Monsieur Manoir, quoiqu'un brin ambitieux, se passaient sans trop de heurts, surtout avec les huiles locales dans les rouages.
Bon. Là, Monsieur Manoir veut des garanties. On ne signe pas des contrats de millions d'euros sans prendre quelques précautions administratives, ça va de soi.
Il se tourne donc vers les services publics, à savoir votre serviteuse, et dépose avec son architecte (redoutablement intelligent et d'un fort bon coup de crayon) un permis de construire.
Là où ça se corse, c'est que les routiers, appelés à la rescousse pendant la vérification d'usage, jugent que (le terrain de) Monsieur Manoir n'est pas assez bien branché et se mêlent de l'emmancher un peu mieux.
L'emmanchage est de taille, il bouscule le projet, que dis-je, il le démultiplie, Socorro crie Monsieur Manoir, A moi les services publics.

Ah, les bons services publics. Mais bon sang, mais c'est bien sûr, nous aurions dû y penser avant. L'emmanchage est sur la grand'route, c'est aux routiers de le programmer !
Donc, voilà la situation :

Monsieur Manoir va obtenir un permis de construire après avoir été facturé de quelques dizaines d'études, et l'emmanchage, qui autorise la cravate à pois à venir mettre ses doigts de pieds en bouquets de violette dans son outil de travail tout neuf, sera payé par (Tonton pourquoi tu tousses ?) vozigues, vopommes (-pom girls). Bon, c'est légèrement plus compliqué que ça mais vous avez saisi l'idée.
Donc, me direz-vous, et là, pourquoi on ne refuse pas le permis de construire ? pourquoi le service public ne récupère-t-il pas les sous de l'emmanchage ?

Ah, mais il les récupèrera. Peut-être. Va savoir. On ne sait jamais, avec le vent.

jeudi 2 avril 2009

Métier : Dessineuse de ronds-points (part III)




Je vous ai exposé les différentes nuances que recouvre la notion d'urbanisme dans une commune.

Mais alors, un directeur de l'urbanisme, que fera-t-il ?
Coordonner ses propres équipes, évidemment, celles que je vous ai listées la fois précédente. Faire en sorte que le responsable Droit des Sols (A.D.S.) remonte suffisamment ses difficultés d'instruction vers le juriste pour faciliter le travail de rédaction des textes. Qu'il informe aussi l'architecte des besoins en évolution qu'il perçoit dans la ville, le nombre de demandes et le nombre de refus de permis pouvant être de bons indicateurs.
Que le responsable actions foncières souligne au chef du prévisionnel et de l'opérationnel les opportunités qu'il perçoit.
Que cet architecte sache communiquer tant à l'A.D.S. qu'au chargé d'opération les objectifs généraux poursuivis, pour que ceux-ci les servent, convaincus et éclairés.

Le directeur de l'urbanisme devra également communiquer avec les autres directeurs de la Collectivité.
Car, tout concepteur qu'est ce métier, il n'a que peu de rapports avec la gestion courante et il lui faut prendre pied avec les enjeux d'une collectivité territoriale.

Les enjeux financiers. L'urbanisme est source de revenus, par toutes les taxes qu'il permet à la collectivité de récupérer : encore faut-il mettre en place les outils pour les évaluer quelque temps à l'avance.
L'urbanisme est source de dépenses, selon si la collectivité souhaite intervenir un peu, assez, beaucoup dans la construction de la Ville (et nous en revenons au débat avec Jean Nouvel) : les dépenses courantes, bien sûr, personnel, fournitures, etc…, mais surtout les dépenses d'investissement pour les opérations (lotir, construire, équiper…), les études diverses et variées…



Les enjeux environnementaux. Ville durable, architecture Haute Qualité Environnementale, font désormais partie des cahiers des charges, des Agenda 21 et des exigences politiques et sociales d'une collectivité. Une commune dispose parfois d'un service ou d'un chargé de mission tenus de veiller à la mise en concert des actions des tous les autres services en fonction de ces enjeux. Pour l'urbanisme, c'est d'autant plus prégnant qu'il s'agit de calibrer les projets publics et d'encourager les projets privés à suivre ces principes. Encourager, par de la communication, de l'incitation, parfois des subventions aux particuliers ou des interventions publiques sur les gros projets. C'est un vrai défi, relevé avec brio par certains, au rabais pour d'autres, ignoré dans nombre de cas.
Je peux difficilement, en tant que FreeWoman, passer à côté de ces enjeux-là...

Les enjeux techniques. L'urbanisation ne peut être considérée comme un simple dessin de volumes sur un plan vierge. Voiries et réseaux, induction de flux et de transports, intégration à un système pré-existant avec ses fonctionnements, ses dysfonctionnements… L'urbaniste ne peut être un autiste, il travaille, il sculpte une réalité, et doit tenir compte des contraintes techniques que ses projets rencontrent ou entraînent.

Les enjeux sociaux. La ville, ce n'est pas que de l'habitat et de l'activité. Ce sont des mouvements, des utilisations d'espaces publics, des équipements rendus nécessaires par la concentration des biens et des personnes. L'urbaniste qui ignore la nécessité d'ouvrir une classe pour 30 enfants ignore tout de son métier. On ne peut vendre du terrain sans en payer le prix.
La relation de l'urbaniste avec "le substrat social" du territoire est donc un préalable. C'est pourtant la plus difficile à établir.

Les enjeux organisationnels. Ils sont du ressort, théoriquement, d'un directeur général des services. Combiner les travaux de réseaux, de voirie, la création d'une ligne de bus et la construction d'un quartier complet, augmenter les services au public au pro-rata du nombre d'habitants nouveaux, c'est son travail de management et d'organisation.
L'urbaniste, lui, saura donner une évaluation du temps que tout cela peut représenter, au moins une fourchette. Il pourra se tromper, si le "quartier "se "vend" mal, ou s'il se vend trop bien. Mais l'urbaniste aura contribué, en tout cas, à ce schéma organisationnel.

Les enjeux humains. C'est peut-être la portion la plus impalpable et la plus "dramatique" de ce travail, "dramatique" au sens du changement du cours des choses pour la population.
Modifier une parcelle du territoire, c'est modifier le sens que lui donnait une personne ou un groupe de personnes. Cela peut provoquer des nœuds de conflit assez durs. Que ce soit la démolition-reconstruction des grandes cités, dans lesquelles bon an mal an des habitants s'étaient enracinés, ou que ce soit dans la transformation urbaine d'un paysage auparavant vierge et naturel, l'urbaniste rencontre des résistances humaines à son action, doit les ressentir, les soupeser, peut-être parfois les résoudre.
Pour faire face à ces problèmes, les élus ont inventé la "démocratie participative". Je ne sais pas pour qui cela marche, pour ma part j'optimise les projets avec le maternage et l'accompagnement personnalisé, investi, des opérations perturbantes. C'est éminemment chronophage, ça demande pas mal de psychologie, mais si c'est réussi, c'est aussi très satisfaisant, car au lieu d'avoir réussi seul, on a réussi à plusieurs. Et la sauce prend !

Et c'est là tout l'objet de l'urbaniste : donner ou redonner la Ville à vivre.

vendredi 27 mars 2009

Grand Paris - Droit de Suite


A vous de juger... sur le site "officiel" :

http://www.legrandparis.culture.gouv.fr/
(attention, beaucoup de parlottes et peu de plans... c'est aride).

Un diaporama complet sur le site du Figaro : http://tinyurl.com/gdparis


Et aussi, le blog d'un citoyen pour un autre éclairage : http://parisbanlieue.blog.lemonde.fr/

jeudi 26 mars 2009

Métier : dessineuse de ronds-points (Part II)

Indépendant des services techniques ou pas, l'urbanisme dans une Commune est généralement sous la coupe d'une même direction, mais recouvre plusieurs domaines. J'évoquerai assez peu le rôle des élus ici, mais il est bien entendu que rien ne se fait sans leurs décisions, et leurs orientations politiques générales. D'ailleurs, en urbanisme, le rôle politique est majeur, et repose sur des fondements doctrinaux très tranchés : mixité sociale ou gentrification/ghettoïsation, multipolarité ou répartition des fonctions par espace, .en dessinant une ville, on fait acte éminemment politique.

Le service de l'urbanisme prévisionnel et opérationnel est parfois le même service. Il agit sur différents fronts.


Pour faire de la prévision en urbanisme, il convient d'avoir un esprit de conception et d'anticipation. L'on imagine très bien un architecte-urbaniste et son équipe établir des rapports sur l'état urbain (ou lire ceux de l'Agence d'Urbanisme), puis tirer des traits, faire des schémas, des cartes, des plans, bref, donner des orientations que les élus suivront ou réorienteront. Dans le cadre territorial, et suivant la politique maison (externalisation ou non), ils seront surtout amenés à rédiger les cahiers des charges des bureaux d'études dont ce sera la mission. Ce peut être un brin frustrant. Ou on peut le prendre au contraire comme l'opportunité de diriger de grands cabinets… mais ce n'est pas donné au premier venu.


Pour accompagner l'architecte dans sa tâche, il faudra un spécialiste du droit de l'urbanisme. Celui-ci aura le plaisir de s'adonner à la rédaction des documents d'urbanisme, règlements de P.L.U., S.C.O.T., Z.A.C. (ces termes barbares sont définis par le site du droit de l'urbanisme, assez fouillé)… ou s'évertuera à dépiauter les lois et jurisprudences qui lui permettront de défendre un permis de construire ou un texte contraignant. Il sera amené, surtout, à élaborer, suivre ou contrôler toutes les procédures que lancera le service, pour quelque document que ce soit.



Le chargé d'opération, quant à lui, sera spécialement affecté à un ou plusieurs secteurs définis pour lesquels la collectivité investit, dirige ou accompagne : des immeubles, des zones économiques, ou encore l'amélioration de l'Habitat ou une zone de restructuration urbaine, tels seront ses champs de bataille. Il devra coordonner les acteurs, veiller au respect des budgets et des calendriers, satisfaire aux procédures, bref, opérer. C'est lui, aussi, qui sera saisi des opérations lancées par des promoteurs privés, pour lesquelles les élus, souvent, devront émettre un avis.



Le responsable du service de l'action foncière mènera les ventes et les acquisitions de biens pour servir l'ensemble des projets dessinés et lancés par le service urbanisme "prévi / op".
Le nez sur les opportunités, le marché de l'immobilier et ses évolutions, il pourra peut-être aller jusqu'à proposer des actions précises pour profiter de la conjoncture, contrecarrer certains mouvements ou les accompagner.
Enfin, il sera chargé des actions un peu plus coercitives comme les expropriations et les préemptions, c'est-à-dire les achats en lieu et place des acheteurs déclarés.


Pour le responsable de l'Application du Droit des Sols (A.D.S.), il s'agira d'instruire les demandes de permis de construire et autres autorisations du genre.
Il s'agit d'un travail méticuleux, méthodique, inscrit dans un carcan de procédure, qui laisse peu de place à la fantaisie mais fait tout de même appel, souvent, à un certain don pour l'interprétation de textes rédigés de façon obscure.
A ce titre, la formation des agents à l'accueil du public, à son information et son conseil, devrait être une de ses principales préoccupations. C'est malheureusement difficile de trouver, en une seule personne, la qualité de la rigueur et de la méthode, et celle d'un contact agréable et d'une pédagogie accessible. La constitution d'une équipe assez complémentaire est donc l'objectif : il faut à ce poste un bon manageur.



Pour ce qui me concerne, je suis seule avec une assistante pour faire un peu tous les métiers que je vous ai décrits ici, plus et surtout celui que j'évoquerai la prochaine fois. Ça demande une certaine gymnastique mentale, et un bon esprit de suite. Ou d'avoir une assistante qui vous aide à vous organiser. Ou pas. Oups.



Merci au blog de Mr Bonhomme



mardi 24 mars 2009

Métier : dessineuse de ronds-points (Part I)

La définition de mon métier m'a toujours posé problème.

Un comptable gère, un chercheur recherche, un enseignant enseigne, un architecte conçoit et supervise, un directeur dirige, manage et organise, mais un urbaniste, au juste, puisqu'il n'urbanise pas directement, en tout cas pas tout seul, que fait-il ?

Pour faire court, j'ai coutume de plaisanter en disant que je dessine des ronds-points. Ce qui doit m'arriver tout au plus une ou deux fois par an, et encore je ne tiens pas le crayon moi-même.

Pourquoi les ronds-points, qui sont plutôt la prérogative des routiers du service technique ? Parce qu'ils sont emblématiques d'une certaine vision de ce métier, souvent très réductrice. L'urbaniste, en France, c'est l'empêcheur de tourner en rond. Et pourtant il essaie de rendre la Ville plus fluide…

Au-delà de la plaisanterie, la réalité du métier est assez "vaste". Par définition, l'urbanisme s'intéresse à la géographie de tout un territoire, de part en part. Pas seulement sa partie urbaine, mais principalement, car c'est souvent la plus complexe.
L'urbanisme cherche à définir puis à faire évoluer cette géographie. La faire évoluer, c'est-à-dire orienter et encadrer la construction, principalement.

Alors pourquoi dessiner des ronds-points s'il est surtout question de construire des bâtiments ?


Parce que l'urbanisme est très lié aux voiries et réseaux. En effet, une des premières choses à apprendre en urbanisme, c'est que la ville est une succesion de synapses et de flux, que les pouvoirs publics ont en charge d'assurer.


L'urbanisme est une science, ou plutôt un art, de réseaux. D'ailleurs, quand vous cherchez un travail au Pôle emploi, le terme urbaniste désigne le plus souvent et dans le Code Rome, un spécialiste en informatique des réseaux.

Dès que vous projetez une amélioration, une densité, une extension urbaine, la première question à se poser, c'est l'accessibilité et la viabilité du projet. Un projet sera réalisable, si le rapport coût de desserte / coût de réalisation n'est pas trop important, si le prix auquel on peut vendre le bien ou le terrain n'est pas inférieur à la somme des travaux investis et du prix d'achat initial. Et dans travaux, il faut comprendre aussi protection par rapport aux risques sismiques, inondations, mouvements de terrain, nuisances acoustiques i tutti quanti. Sauf bien sûr si ces risques sont imparables. Je m'égare…

Tout ceci explique, d'ailleurs, que dans nombre de municipalités, le service urbanisme ait été intégré aux services techniques généraux. Un directeur des Services Techniques est comptable, lui, de la charge globale des investissements, et s'en préoccupera peut-être davantage que ne le ferait un architecte-urbaniste, enclin aux projets grandioses. Il est donc appelé à encadrer et à maîtriser la planification urbaine, par le biais des plans d'investissement en travaux publics.

Notez que la manière dont les services sont organisés est très parlante quant à l'orientation générale que prend la collectivité.
Lorsque vous voyez le service urbanisme directement rattaché à la direction générale, c'est généralement que la Ville a de nombreux projets. Ce n'est pas la gestion courante que règle principalement le service urbanisme, mais bien l'encadrement de ces projets. Et c'est signe d'une volonté politique très forte en la matière, dont le principe directeur est l'aménagement d'un territoire au service de sa population, et non des contingences uniquement pratiques. Bien que, de toutes façons, l'urbanisme est issu d'une forme majeure du sens pratique. Une forme visionnaire. La plus casse-gueule, quoi.

Quoi qu'il en soit, l'urbaniste ne travaille jamais seul. Dans le meilleur des cas, il coordonne tout ça. Il est au moins une pierre angulaire de cette coordination.



La prochaine fois, j'essaierai d'exposer quelles nuances recouvre le métier d'urbaniste territorial, les enjeux et les liens de son métier avec le reste de la collectivité et de la société.


Références images : voir bibliographie de l'article de F.Ascher sur les métapoles.


jeudi 19 mars 2009

samedi 14 mars 2009

Sa Majesté Jean Nouvel


Jean Nouvel est un architecte très admiré, et c'est mérité. Qui ne connait l'Institut du Monde Arabe, ou l'opéra de Dubai ?
Je prone que l'architecte est un acteur Politique de la construction de la ville. Meme s'il l'est moins (politique) que l'urbaniste. Ce sont parfois les memes, d'ailleurs.



Alors, je pose la question : Jean Nouvel est-il un ultra-libéral échevelé (haha) ? Ou est-il au contraire un interventionniste acharné ? En tout cas, à coup sur, il est pour le règne des architectes.

J'ai écouté le roi Jean sur France Inter.


Il exposait le projet de son équipe pour le Grand Paris, qu'il remettait hier à Nicolas Sarkozy après l'avoir présenté au Conseil Economique et Social (notez au passage que le Grand Paris a été étudié non par 10 urbanistes mais par 10 architectes. Très symptomatique de la mégalomanie présidentielle).




A une question d'une auditrice, qui demandait qui paierait pour ces projets apparemment pharaoniques, Jean Nouvel a répondu la chose suivante.
Ce ne sont pas que les pouvoirs publics qui ont un pouvoir sur la ville. Les lieux peuvent etre investis par quiconque a besoin d'un espace, pourvu qu'un architecte se charge de son projet.
Il a précisé sa pensée : une sale manie en France, c'est le zonage urbanistique (voir explication en fin de billet). Comme si l'on pouvait découper la Ville en rondelles, l'une pour l'activité, l'autre pour l'habitat, sans lien entre les deux... bref, il s'est emporté, précisant que dézoner permettrait surtout à des privés d'investir des lieux jusque là restés hors de portée, par exemple pour faire des lofts dans des friches industrielles etc... Riche idée pour ne pas laisser des espaces en déprise, c'est sur. D'ailleurs il veut que Paris soit une grande métropole compétitive.
Serait-ce à force de travailler sur des projets démesurés à Dubai, Pékin, Sydney, New York i tutti quanti, qu'il pense qu'on peut construire le Grand Paris en mélangeant tous les usages dans un meme endroit, sans faire cas des besoins et des moyens parfois simples, modestes, qu'a la population ?
La ville laissée aux mains des investisseurs, c'est la loi du marché dans toute sa splendeur, et sur les espaces forts d'enjeux, cela laisse peu de place à la modestie des usages.
C'est oublier trop vite que la ville est, aussi, aux mains de ses habitants.
Alors je vois bien qu'il projette des maitrises fortes de l'espace commun. Le paiement de ces infrastructures reste à dessiner... Les collectivités n'ont-elles pas déjà fort à faire avec la misère de la population qui s'aggrave, la nécessité de reprendre à leur compte les services publics déchus que l'Etat laisse partir à vau l'eau, la formation professionnelle, l'accompagnement des chomeurs... ?
Un Grand Paris par Jean Nouvel imposera, à tout le moins, le vote de lois sinon spécifiques, du moins adaptées pour contraindre les investisseurs privés à participer, s'ils veulent bénéficier de situations clés, aux projets publics. L'imbrication de ces projets est une sacrée paire de manches. Il faudra une volonté politique à la mesure des requins en face. A moins qu'on les laisse entièrement faire, mais là...
Car pour trouver les investisseurs, il faudra forcément se tourner vers de grands consortiums capables d'avoir une vision sur le long terme et de porter financièrement sur de longues périodes des projets de cette taille. Cela ne laissera que peu de places aux artisans, cette première entreprise de France, aux commerçants de détail, et ouvrira encore plus le champ aux groupes financiers qui se sont pas mal cassé la binette ces derniers temps et se sont fait regonfler les biceps par les Etats...
En outre, et là on en revient au fameux zonage urbanistique, il y aura un gros problème pour financer les logements sociaux, les équipements publics etc... sur des espaces dont le prix foncier atteindra des sommets.
Et que penser des espaces plus à l'écart encore du grand centre, où la maitrise foncière et politique ne sera pas aussi forte ?


Imaginez. Vous possédez, à 40 km de Paris, un terrain viabilisé d'environ 10 000 m². A qui allez-vous le vendre si le zonage urbanistique ne vous contraint pas ? À l'industriel qui veut faire son usine, créer 100 emplois, et vous l'achètera 25 € du m² ? A la société d'HLM qui vous proposera un peu moins de 20 € du m² et vous louera un garage dans l'opération ? Au lotisseur de standing qui vous paiera 150 € du m² en vous laissant un lot à disposition ? Au groupe commercial qui vous en donnera 75 € du m² en vous proposant des parts dans la galerie ? Ou à l'agriculteur qui vous paiera, allez, soyons fous, 1 € du m² pour y faire paitre ses vaches ?
Si en plus de cela votre terrain est dans une situation stratégique, à proximité d'une autoroute et d'une gare, les prix du lotissement, de l'usine et du commerce grimpent.
Et puis après tout, vous payez des impots, la collectivité fera les infrastructures pour emmener la population à son travail, dans les usines 80 km plus loin.
A moins que vous soyez un propriétaire éminemment politique, c'est à dire une collectivité, vous n'aurez que peu d'hésitations...

L'urbanisme laissé à l'investissement privé guidé par les architectes (attention, pas les architectes regroupés dans une société, les libéraux, qui travaillent chacun pour leur peau et qui sont payés au volume), voilà ce que ça donnera : des ghettos de fric. Les pauvres d'un coté, les riches de l'autre, un gouffre (ou un tunnel) entre les deux, aucune place pour les centres d'emploi, de la place que pour la misère, ou alors une mainmise de la collectivité sur les terrains, et une volonté interventionniste sans faille (je demande à voir).



Jean Nouvel est-il donc utopiste, ou Abu Dhabi lui a-t-il fait croire que tout le monde pouvait s'en remettre aux architectes ?
Mais il est vrai que penser le Grand Paris, c'est une vraie ambition, et ça n'a rien à voir avec la vie de village.


Ici mon explication sur le zonage qui est, il est vrai, notre base de travail en urbanisme en France depuis l'avènement des Plans d'Occupation des Sols il y a des ... pfiou, des décennies.
Le zonage, c'est le découpage du plan d'un territoire en des secteurs juxtaposés, de préférence cohérents, pour distinguer là où on a le droit de faire de l'industrie, là où on a le droit de faire de l'habitat mixé avec des commerces (les centres-villes), là où on a le droit de faire des immeubles, là où on n'a le droit de faire que de l'agriculture ou de laisser la nature en l'état... bref, on laisse les propriétaires maitres de leurs terres, mais on ne leur autorise pas n'importe quelle utilisation, afin de préserver de l'espace pour cultiver, ou simplement pour préserver la nature, afin d'émailler le territoire de plusieurs usages. Et c'est important car, dans des espaces aux enjeux forts, comme la grande banlieue, où la tentation de l'étalement urbain est prégnante, le zonage urbanistique est plus qu'un frein, une vraie méthode de contrainte des pouvoirs publics pour maitriser l'usage d'un territoire dans une société libérale où le droit de propriété est quasi inaliénable.




Arnaud Frich, photographe de villes

mercredi 11 mars 2009

Les Agences d'urbanisme


Quand j'ai démarré dans l'urbanisme, je voyais un peu l'agence d'urbanisme comme un concentré de compétences techniques, et j'aurais rêvé d'y travailler si mes études n'avaient pas été aussi académiques, si je ne m'étais pas dessiné une carrière de généraliste.
L'A.U. évalue les politiques publiques en matière d'urbanisme, fait des études urbaines de toutes sortes (habitat, transport, économie, équipements...), indique aux élus quelles directions prendre, anticipe, fait des scénarios, cartographie la ville, bref, observe, compare et oriente.

L'agence d'urbanisme, ce serait un peu comme l'oeil et le cerveau de la Ville.

Mais je négligeais beaucoup, par méconnaissance, la main. Le coeur.

Et de fait, le service urbanisme d'une commune a beaucoup plus à faire en matière opérationnelle.

Constituer des réserves foncières.
Préparer et mettre en oeuvre les décisions des élus pour ouvrir une zone à la construction, ou pour valoriser un espace naturel.
Se donner les outils juridiques pour réaliser des équipements, ou orienter des aménagements.

Au contact des élus, de certains en particulier, j'ai pu apprécier quels paramètres entraient en jeu dans les décisions. Les bonnes raisons, les mauvaises raisons, celles qu'il est difficile de juger. Au bout du compte, là où l'agence d'urbanisme rationnalise autant que possible, le territorial sert l'argumentation à un élu dont les objectifs ne sont pas forcément ceux fixés par un beau schéma.
La décision politique s'appuie sur une quantité de paramètres incalculables pour le technicien, utopiste par nature. Des considérations électoralistes, bien sûr, mais aussi des accès de mégalomanie, parfois, ou des façons de servir des copains, architectes, constructeurs, sans que ce soit dicible. Et tout un tas de raisons totalement subjectives, la peur, l'incompréhension, le goût...
Ah ! le goût en matière architecturale et urbaine, quoi de plus caricaturalement tranché ?

En tout cas, si j'en suis là aujourd'hui, ce n'est sûrement pas le trajet que j'aurais suivi, si j'avais travaillé en agence d'urbanisme. Et je ne regrette pas, quelque part, mon bagage. Il est fort riche, et si je suis désenchantée d'une certaine manière, je me sens pourtant plus forte, et j'ai arguments et motifs pour influencer les choix des élus, j'ai la patience, j'ai les outils, et surtout, je connais l'angle qu'il faut attaquer pour modeler l'édifice.

jeudi 5 mars 2009

Surprises


L'urbanisme est une discipline aux multiples visages.
Il y a bien sur le plus connu du grand public, le permis de construire, toute une dimension très administrative sans grand intérêt, si ce n'est l'exercice d'une vraie rigueur et la pédagogie.

Et puis il y a le dessin de la ville, sa projection dans le temps; et les outils à mettre en oeuvre pour que le dessin prenne vie. Le contact et l'échange avec les acteurs de la Ville, le ressenti du monde qui bouge, l'esprit des lieux, les flux et les fluides, la tension du temps, la création et la stratification, toute une dimension impalpable, enfin, sortie de l'imaginaire comme du bon sens.
Urbanisme prévisionnel, pré-opérationnel, conception urbanistique et architecturale.

Après quelques années de pratique de cet urbanisme aux multiples visages, je sais que c'est la conception qui me donne le plus envie, et le pré-opérationnel le plus de satisfactions.

Je m'étonne même d'être aussi affirmée dans cette voie, et d'être déjà, d'une certaine manière, reconnue dans mon nouvel environnement professionnel alors que je travaille dans une toute petite collectivité.

Quand certaines perspectives s'offrent à vous, il faut du courage, de la lucidité, une lucidité qui n'a que faire de modestie ou d'humilité.
Aujourd'hui, j'ai surtout envie d'avancer, d'apprendre, et de me propulser. De stimuler mes capacités et devenir... ce que je sais être.

mercredi 4 mars 2009

Retour à Chabrière


Eprouve-t-on toujours autant d'impatience
Lorsque, au pied de la montagne à gravir,
L'on voit le soleil se lever et découper
Le relief désordonné fragile et monstrueux ?

A quelques pas de là, le pont de bois franchi,
Dans le sentier des traces nous précèdent,
Puis on les dépasse ou on les perd.

L'impatience grandit avec le jour qui assèche la rosée.
Les odeurs, d'abord contenues et diaphanes,
Imposent peu à peu leur nuage chaud, dense, âcre.

Le corps s'étend, s'étire, soulève les tissus.
Mécanique la jambe déploie son verbe,
Le pied solide ou indécis sur les errements de la sente.

Souffle rauque, poitrine moite, l'impatience a fait place
A cette résignation insensée de l'âne
Qui avance pour avancer, qui sans but suit le chemin tracé
Et dont le regard s'attarde sans les voir sur les fleurs dorées ou fânées.

Un peu plus haut, où la douleur s'étale en vagues floues,
La pause est surprenante.
Les vents de feuilles cèdent aux vents de rocher.
Les minuscules cèdent aux grands ailés.
Les branches résinées cèdent aux genévriers
Le sentier doux de terre cède aux chaos acérés.
A cours de mot, l'on est piqué de pureté,
Mais la course est lointaine et rude.

Après, le courage, le courage seul.
La montagne, belle à bleuir de pleurs,
Jusqu'au sommet s'arrache au vainqueur,
Pour enfin s'offrir toute.

mardi 3 mars 2009

Poésie urbaine ?

Quand on manque d'espace sur la terre... Le renouvellement de la péniche habitée apparaîtra bientôt à Oslo avec les "Loups de mer" de Espen Erikstad.



Un petit diaporama plus complet et un détail explicatif sont disponibles sur le site espagnol UrbaRama.

lundi 2 mars 2009

Printemps poète

Archibaldique secret,
Onctueuse frénésie des tensions,
Courage extatique d'aimer



Tu es revenu
Dans ma prison
Effrayer les manteaux
Qui protègent de la vérité glacée

Tu es reparti,
Masque remis
La chape retombe
Et me dorlote à moitié

Tu t'es retourné
Insolent, pénétrant,
Juste, encore, toujours juste
Et je pâlis devant ce glaive

Grandir, polir, casser,
Cet ongle-là est mon avenir
Et de signe en signe
Je redeviens la rime de moi-même.